En 1948, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, le gouvernement sud-africain mettait en place l’Apartheid : une doctrine d’État séparant la population en deux groupes : les blanc et les noirs. Jusqu’au 30 juin 1991, cette politique de ségrégation à dicté la vie des 28 millions de Sud-Africains noirs et métisses qui ont du faire face à la misère, la discrimination et la violence, au profit des 4 millions et quelques de blancs, descendants des premiers colons néerlandais et européens arrivés par bateau 3 siècles plus tôt.
Le régime de l’Apartheid est aboli depuis maintenant près de 30 ans, notamment grâce à la figure emblématique du président Sud-Africain en fonction de 1994 à 1999, celui qu’on surnommait « Madiba », Nelson Mandela. Malgré son abolition, les cendres de ce régime de ségrégation raciale brulent encore le peuple Sud-Africain, qui souffre encore de nombreux maux.
La mise ne place du régime de l’Apartheid
Instituée par le Parti National (PN) de Daniel François Malan en 1948, l’apartheid, « séparation » en afrikaans, à systématisé les pratiques des premiers colons néerlandais du 17ème siècle. Ce régime se veut l’aboutissement institutionnel d’une pratique jusque-là empirique de ségrégation raciale. En reprenant les bases instaurées par la Compagnie Néerlandaise des Indes Orientales de 1652, les « néo-colons » Sud-Africains théorisent le « Baasskap » qui établit un rapport hiérarchique de maître (Blancs) à serviteur (Noir), ou encore le « Colour Bar Act » qui précède l’apartheid en réservant des post plus avantageux aux blancs. Malgré la prise de conscience de la population majoritaire de sa condition, et de la création de l’African National Congres (ANC) en 1912, les revendications restent impuissantes face au gouvernement suprémaciste.
Beaucoup moins nombreux que ceux qu’ils écrasent, les blancs établissent des lois, que l’Historien Giliomee expliquera par la crainte des « Afrikaners » d’être engloutis par la masse des peuples noirs. La minorité privilégiée, obsédée par sa survie ou peut-être juste par son règne, impose des lois rigides qui finissent par opposer sur un même territoire, une population sur développée, à une société de subsistance. Les noirs n’ont ni le droit de vote, ni de s’assoir sur les mêmes bancs. Ils ne montent pas dans les mêmes bus, ne vont pas dans les mêmes écoles, n’ont pas accès aux mêmes services, aux mêmes soins. Ils sont parqués dans des états fantômes. La ségrégation raciale, est aussi géographique.
A partir du 21 mars 1960, il devient impossible pour les Noirs de se déplacer en zone blanche sans porter une autorisation. Cette « Loi du Pass » déclenche alors une manifestation pacifique à Sharpeville, au cours de laquelle la violence de la police, tirant à balle réelle, marquera les esprits révoltés : 69 morts et 200 blessés et plusieurs centaines d’incarcérations, dont celle du futur président Nelson Mandela.
Les révoltes et leur internationalisation
Les manifestations terriblement réprimées de Sharpeville en témoignent, un tel régime soulève inévitablement des protestations. L’interdiction de l’ANC et de la PAC (Panafrican Congress), deux mouvement noirs anti-apartheid, pousse les militants vers la clandestinité. L’ANC prends alors les armes sous l’impulsion de Mandela, qui sera condamné à la prison à vie en 1964.
Les contestations du régime Sud-Africain débordent de plus en plus des frontières nationales et ethniques. De nombreux blancs britanniques ou catholiques s’y opposent dès le début des années 70, et la communauté internationale use de son influence pour faire pression et les sanctions de l’ONU (1962) poussent le Premier ministre de l’époque, Hendrik Verwoerd à déclarer l’indépendance de l’Union Sud-Africaine. Assi, les déclaration d’indépendances de l’Angola en 1975 et du Mozambique la même année, renforcent le nationalisme noir tout en affaiblissant le pouvoir en place. Les manifestations de la jeunesse noire à Soweto en 1976 dont la violente répression causera 575 morts et le combat pacifique de la nouvelle figure de la lutte anti suprémaciste Nelson Mandela, font pencher l’opinion international.
L’abolition de l’apartheid
Dans les années 80, le système de l’apartheid se fissure. Certains blancs d’Afrique du Sud commencent à enquêter eux même sur les sévices du régime en place et les différents crimes racistes. Le président de l’époque, Pieter Botha, supprime quelque loi ségrégationniste dans les lieux publiques, concernant le « passeport de couleur » ou l’accès des noirs à l’emploi, tout en maintenant sa politique « by white and for white » (« par les blancs et pour les blancs »). En 1984, l’autorisation de l’accès aux métisses et aux asiatiques au parlement ne fait qu’attiser la colère de la majorité noire et de l’opposition. Les grèves, manifestations, discours et révoltes contre le gouvernement se multiplient, et en 1985, les sanctions économiques des pays partenaires de la République d’Afrique du Sud font sombrer le pays dans un désordre politique et social qui poussera les autorités à déclarer l’état d’urgence.
Dans ce chaos, une seule issue possible : abolir l’apartheid. C’est ce que le président Fredrik de Klerk entreprendra en supprimant la totalité des mesures sous la supervision de l’ANC, redevenu légal. Après 27 ans de prison, Nelson Mandel est libéré en 1990 et élu aux premières élections multiraciales en 1994. Il s’impose auprès de la communauté internationale comme le symbole de l’égalité raciale. En 1997 enfin, une nouvelle constitution reconnait l’égalité des droits entre tous les citoyens Sud-Africains, peu importe leur couleur
Du problème racial au problème social
Après 50 ans d’injustice, l’apartheid est enfin aboli. Pourtant, les années de ségrégation raciale restent profondément ancrées dans les mentalités. Avec Mandela à sa tête, premier représentant de la majorité noire, le pays entreprends un processus de réconciliation nationale et internationale et met en place la « commission vérité et réconciliation » pour clarifier les torts, les crimes, et les injustices commises pendant l’apartheid. Mais si les inégalités raciales s’estompent, les inégalités sociales restent bien difficiles à combattre. Presque 30 ans après la fin de l’Apartheid, le pays est en proie à l’injustice, à la pauvreté, et reste divisé sur des critères raciaux. Il occupe la triste place de pays le plus inégalitaire sur des critères économiques selon la Banque Mondiale. Le chômage, qui atteint les 30% en 2021, connait un écart de 63% entre les blancs et des noirs. 15% des Sud-Africains n’ont pas accès à l’électricité et une partie de la population n’a toujours pas accès à la santé de manière décente, et le taux de féminicide y est 5 fois plus élevé que la moyenne mondiale. L’ANC, toujours au pouvoir et rongé par une corruption endémique qui entrave toute réforme économique ou politique, est de plus en plus critiqué par la population et par la communauté internationale. Le pays fait face à de graves problèmes structurels qui impliquent une mauvaise gestion des entreprises. La fragilité des compagnies nationales comme ESKOM , fournisseur d’énergie, fait peser des risques important de surendettements et menace l’activité économique Sud-Africaine et les finances publiques, dont l’état est déjà préoccupant. L’économie n’étant pas en mesure de créer suffisamment d’emplois, la recherche d’une croissance inclusive reste difficile aborder, faisant de l’Afrique du Sud l’une des sociétés les plus inégalitaires au monde ;
Quel avenir pour l’Afrique du Sud ?
S’il veut sortir son pays de sa torpeur, le prochain président Sud-Africain devra rapidement s’atteler à endiguer la corruption tout en promouvant une croissance inclusive. La lutte contre le chômage et le redressement des finances publiques en est une étape indispensable à la réduction de la pauvreté et des inégalités non plus basées sur des critères raciaux, mais sociaux